Somatotype & Leadership : mythe persistant ou véritable levier ?

1 | Origines : quand la morphologie prétendait prédire le caractère

Dans les années 1940, le psychologue américain William H. Sheldon popularise la « Constitutional Psychology ». Il classe chaque individu selon trois composantes corporelles – endomorphie, mésomorphie, ectomorphie – et leur associe un tempérament respectif (viscérotone, somatotone, cérébrotone). L’idée : votre corps révèle votre personnalité, votre potentiel, voire votre dangerosité


Sheldon attribue à chacun un code à trois chiffres (ex. : 4‑3‑1) issu de 17 mensurations et de photographies. Il n’hésite pas à conclure que les silhouettes très mésomorphes seraient « naturellement dominantes », tandis que les ectomorphes seraient anxieux et intellectuels. 

🛑 Problème : réanalysées avec les méthodes actuelles, ses corrélations (r ≈ 0,30) disparaissent dès qu’on contrôle l’origine sociale ou le biais de sélection. 

2 | Zoom historique : la Constitutional Psychology de Sheldon

2.1  Une méthode au parfum d’eugénisme

  • Posture photos nus : de 1940 à 1960, plus de 20 000 étudiants d’universités d’élite (Harvard, Yale, Vassar…) sont photographiés nus sous prétexte d’examen médical. Aucun consentement éclairé ; certains clichés seront détruits dans les années 1970.
  • Atlas of Men (1954) & Atlas of Women (1959) : planches classant chaque corps selon le triplet somatotypique.
  • Mesures comportementales douteuses : temps de réaction, files d’attente, questionnaires de moralité pour « prouver » que les profils 5‑5‑1 (très mésomorphes) seraient plus enclins à la délinquance que les 1‑1‑6 (ectomorphes).

2.2  Les trois "types" et leurs tempéraments supposés

Somatotype

Tempérament (Sheldon)

Traits décrits

Endomorphe

Viscérotone

Sociable, cherche le confort, évite le conflit

Mésomorphe

Somatotone

Actif, compétitif, goût du risque

Ectomorphe

Cérébrotone

Introverti, anxieux, tourné vers l’intellect

 

2.3  Polémiques & réfutations

Critique

Constat

Conséquence

Échantillon biaisé

Hommes blancs, Ivy League

Résultats non généralisables

Procédure non éthique

Photographies sans consentement, visées eugénistes

Pratique abandonnée, archives scellées

Falsification alléguée

Scores ajustés pour confirmer l’hypothèse (témoignage B. Honeyman Heath)

Méthode Heath‑Carter sans volet psychologique

Pas de causalité

Les différences observées relèvent de la perception sociale (halo, dominance)

Le « destin morphologique » n’existe pas

 

3 | Ce que dit la recherche moderne (2020‑2025)

Testé

Résultat clef

Implication leadership

Attractivité générale

Leaders jugés « beaux » émergent plus souvent (méta‑analyse 2025)

Effet halo : danger de confondre beauté & compétence

Dominance faciale

Visages perçus comme forts activent l’amygdale → biais de sélection

Recrutements « au feeling » favorisent les physiques "forts"

Charisme incarné

Posture ouverte & gestuelle expliquent + de crédibilité que la forme du corps

Les signaux non‑verbaux se travaillent, la morphologie non

 

4 | Pourquoi le mythe survit encore

  1. Heuristique rapide : notre cerveau juge force/vulnérabilité en < 200 ms.
  2. Réseaux sociaux : TikTok recycle « Alpha/Sigma body ».
  3. Confusion sport-sécurité‑management : études de somatotype utiles pour l’entraînement athlétique et dans le domaine de la sécurité → glissement indu au leadership.

5 | Risques RH & éthiques

Risque

Effet

Parade

Discrimination morphologique

Sur‑représentation des profils_athlétiques

Anonymiser photo, critères objectifs

Biais de confirmation

On attribue le succès au physique

Entretiens structurés, panel diversifié

Pression corporelle

Troubles alimentaires, stress image

Politiques bien‑être décorrélées de l’apparence

6 | Le vrai levier : body language ≠ body shape

Contrairement au type corporel, la posture, la voix, la gestuelle, la synchronie visuelle :

  1. S’analysent en sciences du comportement
  2. se coaching‑isent (vidéo‑feedback),
  3. influencent immédiatement la perception de charisme.

7 | Feuille de route entreprise

Étape

Outil PROFIL HUMAIN

KPI

Journée "Leadership sans stéréotype"

1 jour, Analyses Vidéos, Mise en pratique

−20 % biais implicite 

Coaching non‑verbal 1‑to‑1

3 sessions

+15 % charisme perçu

8 | Points clés à retenir

  • Somatotype ≠ compétence.
  • Les signaux non‑verbaux sont observables ; concentrez vos efforts là-dessus.
  • Corrigez les biais au lieu de célébrer des silhouettes : l’inclusion est aussi physique.
Pour plus d'informations :
contact@profilhumain.com


Références APA

  • Sheldon, W. H. (1942). The Varieties of Human Physique. Harper.
  • Vertinsky, P. (2007). Physique as destiny: struggles in the science of somatotyping. Canadian Bulletin of Medical History, 24(2), 291‑316.
  • Jonason, P. K., et al. (2025). The beauty bias and leader emergence: meta‑analysis. Journal of Applied Psychology, 110(3), 455‑478.
  • Fahrenfort, J. J., et al. (2022). ERP responses to dominance features from human faces. Scientific Reports, 12, 21345.
  • Schmid Mast, M., & Gatica‑Perez, D. (2023). The aura of charisma: an embodiment perspective. Leadership Quarterly, 34(1), 101‑123.
  • Durwood, J., & Hogue, M. (2024). Somatotype in modern sport: scoping review. Sports Medicine, 54(2), 211‑232.



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