Observer les gestes en terrasse : Ce que le corps révèle quand il se croit tranquille

L’été est propice aux rencontres détendues : terrasses bondées, rires partagés, lunettes de soleil et cocktails colorés.

Mais dans cette apparente décontraction, un monde silencieux continue de s’exprimer : le langage corporel. Lorsque le contexte devient familier et sans enjeu, le corps baisse la garde… et les gestes, souvent inconscients ou mi-conscients, deviennent d’autant plus intéressants à observer.

1. Une mine d’or pour l’observation comportementale

En terrasse, on parle avec les mots... mais aussi avec les bras, les jambes, le dos, les épaules, la bouche, les sourcils.

Pourquoi c’est un bon terrain d’observation ?

  • Les individus ne se sentent pas "observés" → comportements plus spontanés.
  • Le contexte social est riche en interactions réelles (pas filtrées par les écrans).
  • Le corps s’installe, la posture devient révélatrice de la dynamique relationnelle : alliance, opposition, tension, attraction.

Un couple, deux collègues, un groupe d’amis : les dynamiques se lisent dans les inclinaisons du buste, la synchronie gestuelle, les micro-détournements du regard, les micro-démangeaisons, etc.

2. Quand la vigilance baisse, les signaux montent

En situation détendue, la communication non-verbale devient plus authentique.

Selon Goffman (1973), dans les moments dits "hors scène", les individus se relâchent et expriment des signaux plus sincères.
Cela rejoint les observations d’Ekman (2003) sur la "fuite émotionnelle" : quand le masque tombe, les micro-expressions émergent.

Autrement dit : le corps "parle" plus franchement quand l’esprit est en pause.

3. Les pièges classiques d’interprétation

Même si le contexte est idéal, attention à ne pas tomber dans le piège de la projection :

  • Bras croisés = il se ferme → Pas forcément ! Il peut simplement avoir froid (ou avoir une douleur) ou être confortablement installé, dans son monde, dans ses rêves.
  • Elle regarde ailleurs = elle s’ennuie → Peut-être... ou peut-être qu’elle réfléchit, ou qu’un rayon de soleil la gêne.

L’observation comportementale demande neutralité, patience, et attention au contexte global (Navarro & Karlins, 2008).

4. Quelques exercices d’observation à faire cet été

Voici quelques idées à tester discrètement :

- Repérez qui prend le plus de place dans le groupe (position du corps, gestuelle, volume sonore).
- Observez si les personnes sont synchronisées (rythme des mouvements, posture, respiration).
- Notez les changements de posture en fonction des sujets abordés.
- Essayez de voir qui se sent à l’aise, qui est tendu… 

Objectif : voir sans juger, apprendre à affiner son regard.

En conclusion

La terrasse, ce n’est pas seulement un lieu de détente : c’est un laboratoire vivant pour qui sait regarder.
Et comme toujours avec le non-verbal : ce ne sont pas que les gestes qui comptent… mais leur contexte, leur cohérence, et leur synchronie.

Alors cet été, entre deux gorgées de café glacé, prenez le temps de regarder le monde sans parler. Vous y verrez beaucoup plus que vous ne l’imaginez. 😉

Références APA

  • Ekman, P. (2003). Emotions Revealed. Times Books.
  • Goffman, E. (1973). La mise en scène de la vie quotidienne. Minuit.
  • Navarro, J., & Karlins, M. (2008). What Every BODY is Saying. Harper Collins.
  • Pease, A., & Pease, B. (2006). The Definitive Book of Body Language. Bantam Books.

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